Monnaie marchande du Labrador
Avant que les banques s’établissent dans les régions éloignées du Canada, il fallait expédier de la monnaie sur de longues distances dans des contrées sauvages et souvent sans loi pour que les entreprises puissent payer leurs employés : une démarche risquée. L’autre solution consistait pour l’entreprise à émettre sa propre monnaie. Cette monnaie marchande privée, qui prenait la forme de « bons », servait à acheter des produits au magasin de l’entreprise ou dans la localité. Lorsque les employés retournaient dans les grands centres, ils pouvaient échanger leurs bons contre de l’argent comptant au siège social de l’entreprise. Fondée en 1900, la Grand River Pulp & Lumber Company exploitait une scierie située au bras Hamilton, à l’embouchure de la Grande Rivière (maintenant connue sous le nom de « fleuve Churchill »), sur la côte du Labrador, près de Goose Bay. De 1902 à 1911, l’entreprise a émis des bons de 5, 10, 25 et 50 cents et de 1, 2 et 5 dollars pour payer ses travailleurs.
Lorsque Alfred Dickie, un entrepreneur forestier d’Halifax, a sollicité un permis de coupe pour son entreprise de la Grande Rivière, le gouvernement du Québec a déposé une plainte et déclaré que les terres en question faisaient partie de son territoire. Le bois coupé par Dickie a même été estampillé comme s’il appartenait au Québec. Le gouvernement de Terre-Neuve refusant d’annuler le permis, un différend frontalier de longue haleine s’en est suivi. En 1904, les deux gouvernements s’en sont remis au Conseil privé britannique, qui a tranché en faveur de Terre-Neuve en 1927. Le Québec n’a pas accepté le verdict et l’affaire est demeurée en suspens jusqu’à ce qu’elle soit officiellement annulée, en 1971, soit 60 ans après la cession des activités de l’entreprise de Dickie. Celui-ci n’aurait pu se douter que le différend frontalier déclenché par sa demande de permis de coupe allait rester irrésolu pendant 71 ans.
La Grand River Pulp & Lumber Company a émis les seuls bons de marchand connus provenant du Labrador, une région qui à ce jour demeure encore largement inexplorée et peu peuplée. La Collection nationale de monnaies renferme un assortiment complet de bons, ayant appartenu à Joey Smallwood, un ancien premier ministre de Terre-Neuve, qui nous rappellent ce chapitre de notre histoire.
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