Naissance de la série Scènes du Canada avec le billet de 20 $
Le billet de 20 $ de 1969 est le prototype de la série Scènes du Canada. À mesure que d’autres billets ont été conçus, le thème – et le billet de 20 $ lui-même – a changé.
Appel à tous les imprimeurs de produits fiduciaires!
En 1963, la Banque du Canada a demandé à des sociétés d’impression de produits fiduciaires de lui soumettre des propositions pour la conception d’un nouveau billet de banque. Des entreprises du Canada, de Belgique, de Grande-Bretagne, de France et de Suisse se sont disputé le contrat en inondant (ou presque) la Banque de différents modèles de billets de 20 $. La plupart de ces modèles avaient un point en commun : ils étaient visuellement très élaborés et très fournis. Certains, particulièrement chargés, arboraient de nombreuses couleurs, des motifs complexes et des guillochis (décorations produites mécaniquement et semblables à des motifs de spirographe). C’était le moyen par excellence de contrer la contrefaçon à l’époque : créer un billet au graphisme et aux couleurs d’une telle complexité qu’il serait extrêmement difficile d’en créer une reproduction fidèle.
Beauté ne rime malheureusement pas avec sécurité
L’une des propositions s’est démarquée de la tendance générale avec des illustrations tout simplement merveilleuses – et merveilleusement simples – des divers secteurs d’activité au Canada. Sobres, élégantes et majestueuses, on les attribue à George Fanais de la British American Bank Note Company. La disposition parfaite des vignettes dans un format horizontal dénué de tout cadre séduirait n’importe quel graphiste. Tout simplement magnifique! Mais la Banque recherchait des éléments de sécurité efficaces.
Et le gagnant est… un Britannique
Cela ne veut pas dire que la proposition retenue n’était pas jolie – bien au contraire. C’est l’entreprise britannique Thomas de la Rue (désormais appelée simplement De La Rue) qui a décroché le contrat pour concevoir les caractéristiques générales du billet, son cadre et ses motifs. Dégradés subtils; guillochis en arrière-plan et sur le pourtour des coupures formant un ballet de lignes serpentines : ce billet ne ressemblait à aucun autre en circulation. Comme dans les séries précédentes, la Banque avait prévu des vignettes pour le verso des billets. Celle de la coupure de 20 $ représente le lac Moraine dans la vallée des Dix Pics du parc national Banff. Mais, ce sont les couleurs qui ont impressionné la Banque, et il n’a pas été simple de les produire.
Avant les imprimantes à jet d’encre
La conception d’un billet difficile à contrefaire passe notamment par l’utilisation de technologies inaccessibles aux faussaires. L’impression lithographique de qualité faisait partie de ces technologies. Cette technique avait été utilisée pour la coloration et l’ombrage des portraits de la série de 1954. La production des nouveaux billets multicolores a nécessité l’utilisation d’une presse lithographique permettant d’apposer plusieurs couleurs simultanément des deux côtés du billet. Cette machine est appelée une presse Simultan. La British American Bank Note Company et la Compagnie canadienne des billets banque ont utilisé ce type de presses pour imprimer la série Scènes du Canada. Les photocopieurs couleur ne sont arrivés sur le marché que plus tard, au milieu des années 1970, et ils sont devenus une véritable menace pour la sécurité des billets de banque au cours de la décennie suivante.
La gravure imparfaite
Le billet prenait forme, mais la gravure originale d’Alan Carswell représentant le lac Moraine ne donnait pas entière satisfaction. Quelque chose clochait : elle manquait de naturel. Le problème a été attribué à la photo d’origine. Il s’agissait en fait un montage créé à partir de plusieurs photos, probablement parce que les arbres n’étaient pas idéalement placés pour une prise de vue optimale. La société d’impression avait acquis des photos de la même scène prises sous différents angles. Alors, à l’aide de bons vieux ciseaux et de ruban adhésif, quelqu’un – possiblement le graveur – a créé un montage de la scène adapté au format du billet, où les arbres ont été avantageusement repositionnés... sans ordinateur ni scie mécanique!
Malgré tout l’effort qui avait été mis dans le montage, l’image a été remplacée par une autre provenant de la collection de photos du Chemin de fer Canadien Pacifique. Le graveur George Gundersen a conçu la vignette définitive à partir de cette nouvelle image.
Évolution de la série
Au départ, il avait été décidé que notre reine figurerait sur toutes les coupures de la série Scènes du Canada, comme dans la série précédente. Mais, en 1968, alors que la production du nouveau billet de 20 $ était imminente, le ministre des Finances, Edgar Benson, a demandé que le portrait de la Reine soit remplacé par celui d’anciens premiers ministres canadiens sur certaines coupures. C’est ainsi que sir Robert Borden (billet de 100 $) et William Lyon Mackenzie King (billet de 50 $) ont rejoint sir John A. Macdonald (billet de 10 $) et sir Wilfrid Laurier (billet de 5 $). Les portraits de Macdonald et de Laurier avaient figuré sur nos grosses coupures en 1935 et 1937. On a conservé le portrait de la Reine sur les billets de 20 $, 1 $ et 2 $.
Le thème des vignettes a ensuite été légèrement modifié : les images sur les autres billets représenteraient toujours des paysages, mais on y retrouverait d’importants éléments d’activité humaine. Une estacade de billots brisée derrière la colline du Parlement, un groupe de chasseurs inuits, des bateaux de pêche de la côte ouest, un site industriel impressionnant et un port de Nouvelle-Écosse sont alors devenus des icônes bien connues de la monnaie canadienne. Puis, l’image d’un cercle de gendarmes à cheval a été proposée, mais il s’agit là d’une tout autre histoire.
Un ancien billet fait peau neuve
Le billet de 20 $ lui-même a subi d’autres changements. Une partie du cadre décoratif du verso a disparu au profit de numéros de série lisibles par une machine. Les couleurs ont été modifiées : on a accentué la couleur rose du motif au recto pour éviter toute confusion avec le billet de 1 $ de couleur verte. Enfin, la vignette n’a plus été imprimée selon la technique d’impression en taille-douce, vieille de plusieurs siècles, et a perdu sa texture d’encre en relief. Après 1984, la vignette a été lithographiée, comme la majeure partie du recto du billet.
Au fil des changements technologiques, la série Scènes du Canada a joué un rôle précurseur en introduisant des innovations qui sont devenues monnaie courante au cours des décennies à venir. Depuis, les vignettes figurant au verso des billets sont lithographiées, et les billets sont dotés de numéros de série lisibles par les trieuses automatiques. Le billet de 20 dollars n’a été qu’un début.
Le Blogue du Musée
Traités, argent et art
La collection du Musée de la Banque du Canada s’est enrichie d’une œuvre d’art de Frank Shebageget intitulée Free Ride. Mais pourquoi un musée consacré à l’économie ferait-il l’acquisition d’œuvres d’art?
Le rai : une monnaie de taille
On dit qu’un objet a une valeur culturelle lorsqu’il est étroitement associé à l’histoire, aux personnes, aux croyances ou aux rituels qui ont de l’importance au sein d’une société. Il en va de même pour un rai. Sa valeur peut augmenter en fonction de la personne qui a autorisé sa fabrication, de celle qui l’a taillé et de ces anciens propriétaires.
Leçons de la Grande Dépression
Ce qu’a permis le krach boursier de 1929, c’est de révéler crûment les faiblesses des systèmes économiques issus du capitalisme débridé de la fin du 19e siècle.