Pièces d’or de la Colombie-Britannique
Les pièces d’or de 10 dollars et de 20 dollars de la Colombie-Britannique comptent parmi les pièces de monnaie les plus connues du Canada. Fabriquées en 1862 avec le précieux métal extrait pendant la célèbre ruée vers l’or en Colombie-Britannique à l’époque, elles sont le fruit d’un programme gouvernemental qui a suscité les rivalités intercoloniales et l’animosité des médias envers le gouverneur. Bien qu’elles n’aient jamais été mises en circulation, ces deux pièces font partie de la première initiative officielle de frappe de pièces de monnaie au Canada, presque un demi-siècle avant la création de la Monnaie royale canadienne en 1908.
En 1857 et 1858, de l’or est découvert à l’intérieur des terres de la Colombie-Britannique. Les mineurs, principalement des Américains arrivant des champs aurifères de la Californie, migrent vers le Nord. Comme la Colombie-Britannique n’est pas dotée de l’équipement nécessaire pour analyser la pureté de la poudre d’or et frapper des pièces, il n’y a aucune façon de transformer immédiatement ce trésor en monnaie sonnante et trébuchante. Les mineurs et les acheteurs exportent donc leur or à San Francisco, où il existe les installations nécessaires. Consterné par l’effet de cette situation sur l’économie de la Colombie-Britannique, le gouverneur, sir James Douglas, prend des mesures pour y remédier. En 1862, il autorise l’achat des appareils requis et commande des matrices pour frapper des pièces de 10 dollars et de 20 dollars destinées à la colonie. Cette mesure contrarie la population de l’île de Vancouver, qui est à l’époque une colonie distincte de la Colombie-Britannique, puisque ses habitants jugent que la nouvelle monnaie devrait relever de leur compétence. Peut-être en réaction à cette polémique, le gouverneur Douglas change d’avis au cours de l’année qui suit et décide qu’aucune pièce de circulation générale ne sera frappée, puis fait entreposer l’équipement. Cette intervention le met en conflit avec d’autres administrateurs publics et déclenche une tempête médiatique qui durera plus d’un an. Cependant, il approuve la frappe de quelques échantillons, appelés essais, et leur envoi à l’Exposition internationale qui se tient cette année-là à Londres. Quelques essais sont aussi frappés de façon non officielle en guise de cadeaux pour des dignitaires locaux.
Seulement une poignée de ces pièces ont résisté à l’épreuve du temps : quelques pièces d’argent frappées par le concepteur de l’époque pour tester les matrices et quelques essais en or frappés lorsque la machinerie a été assemblée.
Bien qu’ils soient de fabrication canadienne, les essais en or frappés en Colombie-Britannique conservent un intérêt international, plus particulièrement pour les Américains, étant donné les liens de ces pièces avec l’histoire de la Californie. En fait, au fil des cent dernières années, la plupart des propriétaires des essais en or ont été des collectionneurs américains. Les matrices, à présent conservées au Royal British Columbia Museum, ont été gravées par Albert Küner, qui travaillait à San Francisco et a préparé les matrices pour d’autres pièces d’or américaines. Ces deux pièces ont d’ailleurs la même taille et la même valeur que les pièces d’or contemporaines américaines de 10 dollars et de 20 dollars, appelées eagles et double eagles.
Même si la décision du gouverneur a empêché la Colombie-Britannique d’avoir ses propres pièces en circulation, divers types de monnaie ont néanmoins eu cours pendant la période enivrante de la ruée vers l’or. La poussière d’or, bien que peu commode, a été beaucoup utilisée, parallèlement aux pièces d’or et d’argent américaines et britanniques, à diverses pièces étrangères et à des billets et d’autres instruments papier de quelques banques locales.
Les pièces d’or de la Colombie-Britannique constituent un élément important de la culture matérielle du Canada. Elles racontent l’enfance de la côte Ouest canadienne, les liens économiques de la région avec ses ressources naturelles et les premières relations avec les marchés américains. Plus précisément, elles représentent l’initiative d’une province naissante voulant affirmer son autorité sur un territoire vierge à la veille de la Confédération.
On trouve d’autre information sur cette période fascinante de l’histoire canadienne dans l’ouvrage de R. L. Reid (1926), The Assay Office and the Proposed Mint at New Westminster, Memoir No. VII, Archives of British Columbia, Victoria.
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