La monnaie de carte
Vous avez probablement entendu dire que les coquillages ont déjà servi de monnaie, tout comme les poils d’éléphant, les cigarettes et les clous. Au Canada, durant l’époque coloniale, on a eu recours aux cartes à jouer en situation d’urgence pour pallier le manque chronique d’espèces sonnantes, comme les pièces d’or et d’argent.
En 1685, la Nouvelle-France est confrontée à une grave pénurie de pièces. Afin de payer les troupes postées aux quatre coins du territoire pour protéger le commerce de la fourrure, l’intendant Jacques de Meulles, dont la fonction est d’administrer les finances de la colonie, se résigne à utiliser des cartes à jouer. Son choix n’a rien à voir avec la couleur ou la valeur de la carte : le valet de cœur ne vaut pas plus que le trois de pique. C’est plutôt parce qu’à l’époque, les cartes étaient taillées dans un carton très rigide pouvant résister à une circulation intensive. On les trouvait en grand nombre et il était facile de s’en procurer. De plus, l’endos était vierge, de sorte que les représentants officiels, dont l’intendant, le gouverneur et le contrôleur de la marine, pouvaient y inscrire la valeur attribuée et apposer leur signature. Pour qu’on puisse facilement reconnaître leur valeur, les cartes avaient été faites de formes et de tailles différentes. Les commerçants étaient invités à accepter la monnaie de carte, étant entendu qu’elle serait convertie en pièces d’or et d’argent dès l’arrivée d’une nouvelle cargaison en provenance de la France.
Pour éviter que le roi de France (lui seul était habilité à émettre la monnaie) ait vent de son stratagème, l’intendant de Meulles émet la monnaie sur son propre compte, avec l’intention de détruire les cartes une fois qu’il les aura rachetées. L’émission, qui ne devait pas avoir de suite, a dû être répétée en raison des fréquentes pénuries causées notamment par les naufrages de navires transportant des pièces de monnaie. Le manque récurrent d’espèces et l’absence d’autres formes peu coûteuses de financement font que les cartes à jouer continuent d’être échangées. En 1717, l’émission de monnaie de carte devient incontrôlable, et le roi adopte une loi interdisant ce moyen de paiement et ordonne le rachat des cartes à la moitié de leur valeur. On estime à 960 000 livres (l’unité monétaire en usage au Canada à l’époque) la valeur des cartes en circulation qui ont été liquidées. En tout, le Trésor ne verse que 360 000 livres. La dévaluation n’a pas été dictée par la surabondance de cartes en circulation, mais par l’indigence de l’État.
C’est ainsi qu’en 1720, cette première page de l’histoire de la monnaie de carte se referme… En 1729, une autre page s’ouvre après la débâcle de John Law, et sa tentative d’établir une banque centrale en France qui laissa le pays en ruine. Mais c’est une autre histoire qui, malheureusement, connaîtra le même dénouement.
Bonne journée des cartes à jouer!
Le Blogue du Musée
Explorons la Collection 11
Par : David Bergeron
On réduisit la taille des pièces de 1 cent, vu le coût du cuivre. Au même moment, l’idée de frapper les pièces canadiennes en nickel, un métal bon marché et abondant, faisait son chemin.
Explorons la Collection 10
Par : David Bergeron
À sa première assemblée internationale, en 1946, l’Universala Ligo décide de lancer une monnaie commune dont la valeur serait stable partout dans le monde.
Explorons la Collection 9
Par : Raewyn Passmore
Autrefois, on a fait la guerre pour contrôler le commerce du thé et on en offrait en cadeau en gage de paix. Le thé a même servi de monnaie.
Paul Berry part à la retraite? Ce n’est pas possible!
Je ne me rappelle pas exactement à quel moment j’ai rencontré Paul la première fois, mais je crois que cela devait remonter à 1984, un peu après son arrivée. On aurait cru que c’était hier… En fait, non.L’avers de la Première Guerre mondiale
Par : Paul S. Berry
En Europe, les pièces d’or et d’argent ont pratiquement disparu de la circulation, à force d’être thésaurisées par les particuliers ou rappelées par les États pour soutenir l’effort de guerre.